« Ils ont pris une sacrée raclée »

Grâce à un lecteur attentif de ce blog, j'ai retrouvé cette succulente vidéo du général Puga qui, à la fin du mois d'août 2008, évoquait la "sacrée raclée" infligée par nos troupes aux Taliban. Hélas, et pour reprendre les termes du général, seul un "stratège en chambre" peut estimer que cet engagement a été un succès. Je m'explique :

 - Tout militaire entré en activité après la guerre du Vietnam sait qu'un conflit de cette nature ne supporte pas de pertes importantes dans le camp de l'armée occidentale. Nos sociétés ne tolèrent plus les boucheries de la première partie du XXe siècle et demandent, parfois à tort, des comptes. En tuant 10 soldats français, les Taliban nous ont causé bien plus de tort que nous ne leur en avons causé en tuant 50 des leurs. S'il y a peut-être eu victoire tactique, il y a eu échec stratégique, puisque les pertes enregistrées ce funeste jour d'aôut ont provoqué, et provoquent encore, un choc dans notre opinion. Le général Puga nous explique doctement que les Taliban se sont sciemment approchés de nous pour éviter tout appui aérien : qu'attendre d'autre de la part de combattants qui, pour certains, se battent depuis 30 ans ? Le général Puga aurait-il oublié que les Soviétiques ont perdu leur empire ici ?

- 50 Taliban tués contre 10 Français tués ? Le ratio est inacceptable pour une armée qui est censée disposer d'une puissance de feu largement supérieure, d'une capacité de reconnaissance inégalée et d'un appui disponible en quelques minutes. C'est avec ce genre de rapport pertes ennemies/pertes amis que ce sont perdues les guerres de l'Empire. Et s'agissant de l'armée française, cela fait belle lurette qu'elle a perdu sa capacité à perdre autant d'hommes pour contrôler un col. Il faudra penser à revoir "Hamburger Hill".

Et je conclus en citant notre Président, qui poussant à ses limites son obsession du "il y a toujours un coupable", a ouvert la voie à la plainte des familles de deux de nos tués :

"En tant que chef des Armées, je n'ai pas le droit de considérer la mort d'un soldat comme une fatalité. Je verrai les familles dans quelques minutes, je veux qu'elles sachent tout. Elles y ont droit. Je veux que vos collègues ne se retrouvent jamais dans une telle situation. Je veux que tous les enseignements soient tirés de ce qui s'est passé."

Réflexions à chaud sur les suites judiciaires de l’embuscade d’Uzbin

La modernité dans ce qu’elle a de plus absurde aurait donc frappé nos autorités aujourd’hui ? La plainte des familles de deux combattants issus du 8e RPIMa et du 2e REP révèlerait à quel point nos sociétés ne supportent plus l’imprévu, le danger, même dans une situation par nature volatile comme un combat.

Cette plainte m’a initialement choqué. Par réflexe, sans doute, comme par calcul politique, j’ai craint qu’une fois de plus l’armée en tant qu’institution régalienne ne soit mise en cause, et j’ai redouté que notre engagement dans cette guerre d’Afghanistan qu’il faut mener, quoi qu’en pensent les analystes de salon, ne soit remis en question.

Et j’ai repensé à toutes ces confidences recueillies depuis août 2008, aux 8 versions contradictoires du gouvernement. J’ai revu les visages arrogants de ces officiers sûrs de leur bon droit, et je me suis dit : et pourquoi pas une plainte ? Il s’agit sans doute de mon côté anarchiste, mais rien ne vaut l’exposition en place publique des petites lâchetés de certains pour me réjouir. Et si cette plainte, pour indécente, qu’elle puisse paraître de prime abord, n’était pas l’occasion de casser quelques unes de nos certitudes sur l’état de notre armée ? Et s’il devenait évident, enfin, que la France s’obstine à mener la diplomatie d’un Empire avec les moyens d’une obscure baronnie ? Car à les écouter, ces familles ne veulent pas la fin de la guerre, elles ne critiquent pas le Président ou l’Etat-Major, elles s’en prennent aux supérieurs directs de leurs fils.

Et Dieu sait qu’elles ont vécu des épreuves, ces familles. Après la mort de leurs enfants, les révélations, les versions divergentes, les polémiques, les rumeurs. Et la maladresse insigne du pouvoir, qui les met dans un avion, les pousse à Kaboul en leur promettant, suprême idiotie, de visiter le champ de bataille, comme si des familles de GI’s avaient visité le Delta du Mékong en février 68…

Et la panne de l’Airbus présidentiel sur l’aéroport de Kaboul… Et le retour en France dans le même avion que les compagnons d’armes de leurs frères, 18 heures de conversation horribles. Et les coups de menton d’un chef de corps digne des « Sentiers de la gloire » ou de la « Colline des hommes perdus », menaçant de porter plainte contre les familles qui osaient poser des questions…

Et la découverte des manquements : non, il n’y avait pas eu de reconnaissance préalable. Oui, les hommes n’avaient pas assez de munitions. Oui, quand les Américains leur ont livré des caisses de 5,56 mm, nos soldats ont découvert que leur FAMAS n’acceptait pas les munitions OTAN…

Car derrière les erreurs, les fautes, la fatalité et la surprise du combat, que va-t-on voir dans tout son dénuement ? Une armée qui en vient à croire ses propres mensonges, un pays qui se rêve aussi puissant que le royaume de Louis XIV, et qui ignore qu’il faut 3 hélicoptères pour en faire voler un, que le canon du Tigre n’est pas fiable, que la France doit acheter des paniers à roquettes (l’arme suprême contre la guérilla) puisqu’elle n’en produit plus et puisque nous misons tout sur le guidage laser, que nos blindés sont fragiles, vieux, que nous n’avons pas de transport pour les acheminer en Afghanistan. Mais il nous reste le nucléaire, cher au Général, et le Rafale, ce chef d’oeuvre de technologie que nous ne vendons pas (non, même pas au Brésil !). Alors, que nous reste-t-il ? Des soldats conscients de leurs mission, qui font honneur à leur pays, qui le sauvent même, malgré lui, d’une humiliation encore plus grande. Et des chefs, beaucoup de chefs, trop de chefs, savamment irresponsables.

Vous ai-je déjà conseillé de lire Marc Bloch ?

On nous prie d’annoncer le décès de…

On nous prie d’annoncer le décès de Tahir Yuldashev, membre fondateur de Mouvement Islamique d’Ouzbékistan (MIO), rappelé à Dieu par un drone américain en août dernier.

Yuldashev était le chef survivant du MIO après la mort, en novembre 2001, de Juma Namangani, l’autre tête pensante du mouvement. Le groupe, fondé en 1997, était à l’origine une organisation d’opposition au régime de Tachkent et avait pour objectif de créer une république islamique incluant l’Ouzbékistan, le Tadjikistan, et le Kirghizistan. Le coeur du dipositif de MIO était placé dans la vallée de la Fergana. C’est dans cette vallée que les forces spéciales américaines firent le coup de feu en 2002.

Jusqu’aux attentats du 11 septembre, le MIO, étroitement lié à Al Qaïda, bénéficiait du soutien du Pakistan et des Talibans. L’intervention américaine, puis occidentale, en Afghanistan, a porté des coups très durs au mouvement, dont les cadres se sont réfugiés dans les zones tribales pakistanaises. En 2004, la rumeur a couru que Yuldashev avait été blessé lors d’un accrochage avec des unités pakistanaises soutenues par les forces spéciales américaines, mais sa mort n’avait pas été confirmée.

 

Le MIO était fortement soupçonné d’avoir réalisé une série d’attentats à Tachkent entre le 28 et le 31 mars 2004, causant la mort de 43 personnes. Le groupe était de toute façon objet de sanctions internationales et figurait sur la liste des Nations unies (Comité 1267) ainsi que sur plusieurs listes nationales de groupes terroristes.

La mort de Yuldasev intervient alors qu’on note une résurgence du jihadisme dans les milieux islamistes radicaux turcophones, le long d’un axe de crise qui s’étend de l’Allemagne au Xinjiang, nommé dans la rhétorique d’Al Qaïda « Turkestan oriental ». Surtout, elle confirme que les zones tribales pakistanaises abritent toujours des combattants étrangers aux côtés des Taliban. Enfin, ce succès opérationnel démontre aux sceptiques que la communauté américaine du renseignement a su, et de quelle façon, surmonter la crise ayant abouti au 11 septembre. Je vous parlerai, un de ces jours, de quelle façon un drone peut éliminer un chef jihadiste…

11 septembre 2001 : des images.

Plutôt que par de longs discours, je préfère ici commémorer les attentats du 11 septembre en postant ce montage réalisé par le Washington Post.

http://www.washingtonpost.com/wp-dyn/content/video/2006/09/06/VI2006090600596.html

Vous y retrouverez des extraits du remarquable documentaire réalisé par Jules et Gédéon Naudet, ainsi que par Rob Klug et James Hanlon, mais aussi des vidéos tournées par des touristes.

Enfin, je vous invite à visiter ces sites : http://www.libertynews.org.nyud.net:8090/wtc/ et http://911.navexpress.com/.

Pour Israël

De façon inquiétante et même alarmante, être un « ami d’Israël » est devenu, dans nos contrées rongées par la paix et la prospérité et gavées de bons sentiments, une insulte. Quand le prêt-à-penser se nourrit des pires théories, il faut craindre pour l’avenir.

Les défenseurs de la cause palestinienne, gagnés par le désespoir, rejoignent la cohorte des diffuseurs de haine, qu’ils soient partisans d’un islam radical construit sur la frustration, d’une idéologie marxiste dont l’échec a ensanglanté le XXe siècle ou des pires dérives des idéologies nationales nées de la Révolution française.

Mais être un ami d’Israël n’implique pas, sauf pour les esprits faibles, une adhésion totale et permanente à la politique de l’Etat hébreu. L’amitié et la loyauté n’ont de valeur que si elles autorisent la franchise, voire les désaccords. Cette exigence de rigueur intellectuelle et morale conduit ainsi à des débats houleux avec ceux que l’on soutient pourtant contre la barbarie.

Ce texte, que j’avais commencé à écrire il y a quelques semaines, a changé de nature à la suite d’une étrange expérience vécue il y a peu et que certains lecteurs reconnaîtront sans peine.

Plutôt que de me lancer dans la rédaction d’un long et insipide « post », je vais tenter d’énumérer dans le désordre les points de fixation d’un débat devenu stérile et pour tout dire assez déprimant tant les deux camps sont sourds.

1/ Quoi qu’en disent certains, la question israélo-palestinienne ne repose pas sur une hostilité intrinsèque de l’islam et le simple fait d’envisager cette hypothèse nous fait plonger dans les horreurs d’une guerre de religion. Il faut en revanche avoir une conscience aigue de la récupération de ce conflit par les islamistes, les nationalistes arabes et les jihadistes. Toute confusion entre islam et islamisme conduit en revanche à une analyse faussée de la crise, et donc à la mise en œuvre de solutions irréalistes, voire contre-productives. La vigilance salvatrice de la communauté juive et sa défense des valeurs de la République ne doivent pas – ou en tout cas ne devraient pas – la conduire à une lecture simpliste d’un phénomène qui dépasse largement le cadre de la Palestine. Le discours du Président Obama au Caire ne devrait pas être perçu par les responsables israéliens comme une menace mais plutôt comme le signe d’une possible détente.

Les habits neufs du panarabisme, désormais paré des atours de l’islam le plus radical, dissimulent mal l’ampleur des tensions entre le nord et le sud. Comme il y a 2000 ans, les laissés-pour-compte poussent aux portes de l’Empire et tentent de franchir le limes.

2/ Grisés par ce demi-siècle de paix, véritable anomalie historique, les Européens ne perçoivent pas la pression quotidienne que le terrorisme palestinien, forme dévoyée de la résistance, fait peser sur la population israélienne. Le silence, voire, pire encore, la complicité des médias européens et la lâcheté insigne des pouvoirs politiques, induisent en erreur la population. Laisser défiler des enfants déguisés en kamikazes du Hamas dans les rues de la République alors que le police interpelle à la sortie des écoles de jeunes garçons pour un menu larcin en dit long sur le trouble qui règne dans les esprits. Si résistance il y a, elle ne saurait prendre la forme de la terreur, et ceux qui comparent nos héros aux membres du Hamas ou du MJIP n’ont pas honte.

3/ Parlons justement de résistance. Le débat sur « qui était là avant » est à la fois absurde, puéril et d’une rare mauvaise foi. Arabes et juifs cohabitent depuis des siècles dans cette Palestine / Judée-Samarie, et toute référence à l’Ancien testament est déplacée. Si personne ne conteste la présence des Hébreux  dans cette terre, il faut également incorporer dans le panorama une forte présence arabe. A partir de combien de siècles un peuple peut-il s’estimer chez lui ? N’y a-t-il pas un cynisme d’une rare violence à justifier en 1948 l’expulsion des Palestiniens vers la Jordanie, le Liban, et l’Egypte en considérant que ces Etats pouvaient/auraient dû les accueillir ? Même s’il n’y avait pas de réelle identité palestinienne – ce qui reste à démontrer – il y a là des dizaines de milliers de drames personnels qu’un Etats moderne ne devrait pas écarter de la main. Et je passe sous silence le concept historiquement discutable d’Eretz Israël, bien loin des réalités historiques antiques. Je renvoie ici à la lecture de 3 ouvrages majeurs sur ce sujet.

4/ Il faut pourtant défendre Israël. Seule démocratie de la région (on attend encore le jour où des commissions d’enquête internationales seront reçues en Syrie, où le Président tunisien sera mis en examen pour corruption et où certains princes saoudiens seront inculpés pour des crimes sexuels), cet Etat incarne l’espoir d’une communauté que l’Histoire a maltraitée jusqu’à en faire la victime d’un des plus grands crimes commis par l’humanité. Là aussi, cependant, il convient de casser un mythe colporté par les radicaux de tous bords : le projet de « foyer national juif » n’a pas attendu la Shoah pour être théorisé et mis en œuvre.

5/ Enfin, et dans une démarche huntingtonienne totalement assumée, ne faudrait-il pas considérer Israël comme une enclave occidentale au Moyen-Orient ? Malgré tous les défauts de sa diplomatie, le pays mérite d’être défendu car ceux qui l’attaquent ne s’en prennent pas seulement à la terre mais aussi à la société et aux valeurs du pays. Mais la politique de colonisation, illégale, répond à une logique purement stratégique (peupler le plus vite possible des terres afin d’aborder d’hypothétiques négociations en position de force) qui, bien que logique, renforce le monde arabo-musulman dans son radicalisme et incite à penser qu’Israël ne veut pas la paix mais une victoire sans partage. On est en droit de s’interroger sur la pertinence d’une telle posture…

Regard froid sur Gaza : la plus grande prise d’otages du monde

Il a déjà été beaucoup dit sur la récente opération militaire d’Israël à Gaza. Des manifestations d’une certaine gauche aux protestations de partis islamistes aux motivations réelles à peine dissimulées, en passant par les justifications au mieux maladroites des défenseurs jusqu’au-boutistes de l’Etat hébreu, on a tout lu, tout entendu.

Entre propagande sur Internet, à la télévision, à la radio, il a été difficile de démêler le vrai du faux, et comme le rappelait Philippe Val un vendredi matin sur France Inter, on ne peut s’empêcher de penser que certaines réactions relèvent plus de l’antisémitisme que de la défense du malheureux peuple palestinien. Ici et là, dans un monde arabe que d’aucuns jugent monolithique mais qui bouillonne, quelques voix ont osé s’opposer au discours consensuel. Parmi ces voix figure celle de Wafa Sultan, auteur d’un retentissant éditorial qui devrait logiquement la mettre en danger de mort (cf. http://www.mediarabe.info/spip.php?article1644). L’Histoire dira si cette opération militaire aura provoqué un réveil des consciences politiques dans une région où les bonnes volontés sont écrasées par le népotisme et les politiques à courte vue.

A l’exception des interventions de Pierre Razoux, on a finalement peu lu d’analyses froides sur l’opération « Plomb durci », pourtant passionnante, si on oublie un instant, juste un instant, les morts et les destructions engendrées.

Quelles ont donc été les motivations et les caractéristiques de ce déchaînement de violence technologique sur Gaza ?

 1/ Le contexte politique immédiat

Face à face, le Hamas, mouvement islamiste radical sunnite se présentant comme la branche palestinienne des Frères Musulmans égyptiens, pratiquant la violence terroriste tout en se prétant au jeu politique (élections municipales en 2005, législatives en 2006), et Israël, un mélange unique d’Etat occidental et moyen-oriental entouré d’ennemis et traversé par de profondes divisions idéologiques.

Alors que le Hamas, à la suite d’un coup de force, s’est emparé de Gaza et ne laisse à l’Autorité Palestinienne (AP)  que la gestion de la Cisjordanie (« West bank » du Jourdain), Israël se prépare à des éléctions législatives dans une ambiance délétère. Olmert fait l’objet de plusieurs enquêtes pour corruption, et la droite nationaliste, emmenée par Netanyahou, gagne des points en pratiquant une surenchère verbale, destinée aussi bien à la gauche qu’à l’extrême-droite.

Palestiniens et Israéliens, pour des raisons intérieures, ont besoin d’une crise majeure qui leur permettra de créer une union sacrée.

2/ La montée des tensions

En Palestine, tout tourne autour de la question de l’oeuf, de la poule, et de qui est arrivé en premier. Ici, le cercle vicieux est limpide :

– tirs de roquettes depuis Gaza sur le sud d’Israël

– raids ciblés israéliens

– nouveaux tirs de roquettes

– blocus israélien de Gaza

– désespoir croissant de la population

– mulitplication des tirs de roquettes (dont le Hamas n’est pas seul responsable. Il faut rappeler ici que plusieurs groupes liés au Fatah coopèrent étroitement avec le Hamas et le MJIP).

– décision israélienne, avant l’intronisation du nouveau Président américain, de lancer son opération.

 3/ Le grand jeu

L’offensive israélienne, ahurissante démonstration de force, n’a évidemment pas eu pour seul but de frapper le Hamas. Le message s’adressait d’abord aux deux sponsors du mouvement, l’Iran et la Syrie, et au Hezbollah.

Critiquée après son opération au Sud-Liban en 2006 contre le Parti de Dieu, Tsahal a eu à coeur de prouver qu’elle gardait une avance considérable sur ses adversaires régionaux, et qu’elle pouvait faire montre d’une volonté inflexible, malgré la virulence des critiques internationales.

Quelques jours après le début des raids aériens, la presse américaine a fort opportunément révélé que Washington avait empêché des frappes israéliennes préventives sur les sites nucléaires iraniens. Rien ne prouve que cette opération ait été effectivement préparée, mais le signal est fort, et relève de la « stratégie du cinglé », appliquée par Richard Nixon lors des négociations de paix sur le Vietnam en 1972 : « Nos ennemis doivent comprendre que nous sommes des fous imprévisibles, détenteurs d’une incroyable force de frappe. C’est ainsi qu’ils se plieront à notre volonté. » Le message est donc clair à l’égard de Téhéran – surtout quand on se souvient de mystérieux raid en Syrie sur des installations secrètes.

Ainsi, tout en frappant le Hamas, israël rappelle à ses voisins que les leçons de 2006 ont été tirées, que la volonté politique est là, que les moyens sont disponibles et que rien ne retiendra leur emploi.

4/ Et si ça avait été pire ?

On a peine à l’imaginer, tant les images ont été choquantes, mais Tsahal a fait preuve lors de cette opération d’une retenue, qu’à défaut de saluer on doit reconnaître. Si le bilan apparaît terrible (de 1500 morts de source palestinienne à 700 morts selon un journaliste italien, et des milliers de blessés), il reste étonnement – je rappelle que je me place d’un point de vue technique –  bas si l’on prend en considération les moyens employés : chasseurs F.15 et F.16, hélicoptères Apache, artillerie, infanterie et blindés. Il suffit pour s’en convaincre de se rappeler des deux batailles de Falloujah en 2004 entre les troupes américaines et les insurgés irakiens, ou du siège de Grozny par l’armée russe.

La parfaite connaissance des lieux, longtemps occupés par Israël, encore accrue par les moyens actuels de localisation (interception des téléphones Thuraya, étude bornes-relais de GSM, etc.) et la présence d’agents infiltrés, a permis des frappes ciblées d’une grande précision. Ce n’est d’ailleurs pas par hasard si les premières bavures ont été enregistrées après plusieurs jours, lorsque le Hamas a fait un usage systématique de boucliers humains. Les règles d’engagement de Tsahal l’ont conduit à ignorer la présence de civils lorsqu’une cible avait été localisée. Ainsi, les Israéliens ont frappé avec précision et en toute connaissance de cause des objectifs que le Hamas, à défaut de pouvoir protéger, transformait en « bavures » en pleurant les « martyrs ».

Prise au piège entre un mouvement, le Hamas, coincé entre ses fondamentaux politiques et religieux et la nécessité d’évoluer, et un pays, Israël, désireux d’envoyer des messages forts à ses ennemis régionaus et à son principal allié, la population palestinienne a une fois de plus fait les frais d’un jeu stratégique qui l’oublie depuis 60 ans.